New York Vendée - Les Sables d'Olonne New York Vendée - Les Sables d'Olonne
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06 January 2021 - 16h47 • 18832 vues

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D’un  côté  la moitié de la flotte, au large de l’Argentine, engagée dans la bataille de l’Atlantique. De l’autre les marins embringués dans les fronts successifs et actifs du Pacifique. De part et d’autre du continent sud-américain, deux mondes s’opposent. Et c’est le dernier grand cap du Vendée Globe qui fait office de ligne de démarcation. Romain Attanasio sera le prochain à passer cette frontière jeudi matin.

Le cap Horn n’est pas seulement l’accomplissement d’un rêve, comme celui formulé il y a 25 ans par Armel Tripon avec trois de ses potes – réalisé à 9h01 (HF) avec en prime un passage tout près du cailloux - ,  c’est une véritable frontière psychologique et météorologique.

Dans le Sud-Est du point Nemo, un quatuor se fait malmener depuis trois jours par une ‘belle’ dépression australe : Medallia, La Fabrique, La Mie Câline-Artisans Artipôle et Charal se coltinent 45 nœuds de vent et des creux de plus de 6 mètres. Une dépression qui occupe également leurs poursuivants Time for Oceans, One Planet One Ocean et  DMG Mori - Global One qui se sont déjà fait doubler par le front et dont la position septentrionale les préserve du plus gros. « La grande houle du Pacifique, je ne sais pas qui a inventé cette expression, parce que  moi j’ai jamais vu ça en trois tours du monde… » reconnaît Jérémie Beyou (18e).  

En tête de ce groupe, sur un des bateaux les plus anciens de la flotte,  la révélation de ce Vendée Globe Pip Hare, se bat comme une lionne pour préserver sa 15e place, malgré des aériens hors service, un problème qui l’empêche d’utiliser normalement son pilote automatique (elle est mode cap et non plus en mode vent). Contactée ce matin en visio, la navigatrice Britannique a temporairement perdu le grand sourire dont elle ne se sépare généralement jamais : « je n’ai jamais poussé aussi loin. Je suis fatiguée. Je savais que ça allait être difficile mais pour la première fois de la course, je me suis fixée un waypoint (point virtuel) : la sortie des mers du Sud »

« Faut-il se faire mal pour apprécier quand c’est bien ? » …
 

…. se demandait Jean Le Cam ce matin en fredonnant une chanson de Johnny Hallyday (encore lui !). Faut-il en baver pour apprécier la douceur des choses à leur juste valeur ?  Faut-il des expériences paroxystiques pour se sentir en vie ?

Comme Jean Le Cam,  les solitaires qui ferraillent en Atlantique Sud savourent le calme et la volupté retrouvés, sur le chemin du retour. « Le soleil, en ce moment, me réchauffe le cœur » se réjouit Benjamin Dutreux (6e) qui doit pourtant remonter dans son mât afin de remettre en état de marche son J2.  « Que c’est bon d’être là ! » s’exclame à son tour Maxime Sorel (10e), passé si proche des îles Falkland, qu’il a pu humer des odeurs oubliées, celles de la terre.

Toutefois, il n’est pas question de se laisser bercer par la quiétude (relative) de ces conditions de navigation. « Je me gratte pas mal la tête, poursuit Sorel. Je viens de prendre mes fichiers météo et le routage me propose trois routes différentes »

Du remue-méninge dans les têtes et du remue-ménage au classement 

Le/La coupable ?  Une situation météo complexe jusqu’au large du Brésil, à commencer par cet anticyclone mouvant au Nord des îles Falkland.

Pour l’instant, Yannick Bestaven est le seul à voir réussi à passer au Nord de ces hautes pressions. Il ne devrait pas tarder à accélérer dans le nouveau flux de d’Est-Sud-Est, un vent qui sera bientôt renforcé par l’arrivée d’une dépression.

Derrière Maître CoQ IV qui a accru son avance (245 milles), rien ne va plus de la 2e à la 4e place. Charlie Dalin, fortement ralenti à proximité du centre de l’anticyclone – 2,5 nœuds cet après-midi ! – est en train de se faire rattraper par… Damien Seguin qui déloge Thomas Ruyant de sa troisième place au pointage de la mi-journée. Un classement à observer avec prudence car LinkedOut et Groupe APICIL sont très éloignés l’un de l’autre en longitude. Le premier, à l’Ouest de l’anticyclone, le second à l’Est.

On trouvait déjà la régate intense, plus intense qu’elle ne l’a jamais été sur un Vendée Globe à ce stade du parcours. Cette remontée de l’Atlantique Sud va encore ajouter une dose de suspense car la situation – à mesure que l’anticyclone se décalera à l’Est - sera plus favorable aux poursuivants.  De Burton (5e) à Herrmann (11e) dont la grand-voile est désormais réparée, une occasion se présente de pouvoir recoller à la tête de flotte.

 

La rédac / Camille El Beze