New York Vendée - Les Sables d'Olonne New York Vendée - Les Sables d'Olonne
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26 January 2021 - 05h18 • 17534 vues

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Message du bord de Clarisse Crémer (Banque Populaire X).

De l’extérieur, j’imagine que l’on doit voir mon bateau aller tranquillement à allure raisonnable plein Nord, droit vers l’objectif final, Les Sables d’Olonne, dans ce vent si joliment appelé les alizés et qui pour une raison que je n’arrive pas à élucider est dans l’imaginaire collectif, un vent synonyme de farniente et de doigts de pieds en éventail.

Dans la réalité, on peut dire que ces derniers jours sont loins d’avoir été des vacances. En prise avec des problèmes d’aérien depuis quelques jours après le cap Horn, j’ai passé depuis le début du Pot au Noir, un sacré bout de temps à m’occuper de ma perche de secours qui a également fait des siennes. Pour l’instant, je touche du bois : après plusieurs changements de prises et changements de câblages, cela va faire 48h qu’elle tient le coup. 

Et cette nuit, alors que ces gentils alizés soufflaient entre 15 et 27 noeuds (je suis assez fière du coup de pouvoir vous donner la force du vent !), j’ai eu une nouvelle déconvenue : mon bateau se remplissait d’eau ! Suite à la rupture d’une section de tuyau de remplissage de ballast, j’étais tout simplement en train de remplir... mon bateau ! Comme je remplissais le ballast par gravité (et non au moyen d’une pompe), je savais qu’il fallait être patiente et étais donc partie faire une petite sieste. Quelle horreur de se réveiller au son de vagues qui ne sont non pas à l’extérieur, mais bel et bien dans mon bateau. Ma bannette est juste à côté du parc batteries, quelle vision de désespoir que ces si précieuses batteries trempées d’eau et éclaboussées par les mouvements de toute cette flotte ! 

Je n’ai pas eu la présence d’esprit de faire de l’humour sur le coup, mais je peux vous dire que j’ai bien pataugé : me voici en train de me baigner sous le vent (heureusement le bateau gîtait très fort et l’eau était contenue sous le vent !), constatant que la première pompe se bouche trop facilement avec toutes les petites saletés qui traînent dans l’eau, (car oui dans le bazar deux sacs de nourriture se sont vidés dans ma piscine improvisée et en particulier plusieurs petits pains sont en train de se désagréger dans l’eau et bouchent ma pompe de cale...), je suis sauvée par la pompe de secours beaucoup plus efficace. 

Après avoir tout vidé, éponge, essuyé, chauffé et après plusieurs échanges (un peu désespérés de mon côté) avec le Team, on constatera assez vite que les batteries censées être étanches semblent en effet véritablement l’être ! Youpi ! 

Évidemment, je ne saurai qu’à l’arrivée s’il n’y aura pas de dommages collatéraux à cette malencontreuse affaire... mais pour l’instant, tout va bien alors j’essaie de me persuader que tout ira bien. 

Je suis vraiment extrêmement fatiguée et écorchée de partout après mes pérégrinations dans les tunnels arrières du bateau en t-shirt et culotte, et quasi incapable de m’endormir maintenant que chaque bruit me fait imaginer que le bateau est en train de se remplir d’eau, mais tout va bien ! C’est un nouvel exercice psychologique pour mon cerveau de bizuth. 

Tout ça pour dire, qu’à l’heure où tout le monde me demande combien de pamplemousses je voudrai à l’arrivée, je ne me sens pas encore prête à y penser. Le parcours est encore et toujours semé d’embûches et comme ce petit village gaulois qui résiste encore et toujours à l’envahisseur, il me faudra encore et toujours veiller au grain, jusqu’à la dernière minute. Ça tombe bien, certains copains me surnomment Bonnemine, ça doit vouloir dire que résister encore et toujours, je sais faire !

 

Clarisse Crémer / Banque Populaire X