New York Vendée - Les Sables d'Olonne New York Vendée - Les Sables d'Olonne
New York Vendée - Les Sables d'Olonne New York Vendée - Les Sables d'Olonne

28 Janvier 2021 - 19h04 • 10982 vues

Partager

Article

Quelques minutes après avoir rejoint la terre ferme, Giancarlo Pedote (Prysmian Group) raconte avec philosophie son tour du monde.

" Après une telle aventure, j’apprécie les petites choses de la vie de terrien. Le fait d’en être privé pendant presque trois mois te fait comprendre que ce sont les choses de tous les jours les plus belles. Je suis content de retrouver ma vie sur terre, ma femme et mes enfants. La vie que j’ai laissé avant, même avec le contexte sanitaire actuel. Ce Vendée Globe est une expérience enrichissante, formidable. J’étais bien en mer, j’ai passé des bons moments.

La solitude

J’ai bien vécu la solitude. Je parlais souvent à ma femme et mes enfants, parfois je mettais mes airpods quand je réglais mes voiles. Après, il y a eu des moments où j’avais juste envie de voler à la maison. Je me disais “allez, je trime le bateau et je vais faire un petit coucou”. Il y a eu des moments de nostalgie. 

Le projet Prysmian Group

On l’a préparé vite ce Vendée Globe, en un an et demi. Je n’ai pas eu de "mentor" derrière moi. J’ai découvert beaucoup de choses par moi-même, même si j’ai rencontré beaucoup de personnes qui m’ont énormément appris. Dans mon équipe, c'était le premier Vendée Globe pour tout le monde. On avait le couteau entre les dents ! On voulait surtout terminer. Après, je suis un régatier, je n’étais pas là pour la croisière. J’ai toujours régaté un peu en dessous de mes possibilités, c'était un choix pour réussir à rejoindre les Sables d’Olonne. 

“J’ai respecté mon bateau”

Je préférais garder le contact mais rester derrière. Je savais comment ça allait partir. Je n’ai pas pris trop de risques. Arriver entre 10 et 15, c’était déjà un bel objectif. Avec 8 bateaux neufs, des bateaux avec de nouveaux foils… Moi, je n’avais pas upgradé mon bateau, on a un budget serré. J’avais vu dans les courses d'avant saison que certains bateaux allaient beaucoup plus vite. J’avais quand même accepté ça. J’ai respecté mon bateau et ça a payé. La machine répondait parfaitement. Après, j’ai eu des soucis techniques. Je suis monté 3 fois en tête de mât. J’ai eu des soucis de moteur, des problèmes de batteries qui ont été un stress énorme. À ce moment-là, je me suis dis que c’était fini. 

À chaque fois que je fais du bateau, des courses, à un moment je me demande ce que je fais là ! Ça fait 12,13 ans que je fais du solitaire. Je me connais, quand je me dis cette phrase, c'est parce que je suis en train de repousser mes limites. Et c'est pour ça que je le fais, parce que j’adore me montrer que je suis capable d’aller plus loin. En mer, tu ne peux pas partir, tout arrêter ! On trouve toujours des solutions, c’est la magie de la mer, elle t’offre l’occasion de grandir. À terre, on se sort parfois des difficultés trop facilement. C’est un objectif dans la vie personnelle, de toujours me renouveler, d'aller vers l’avant. 

Dans chaque chose que je fais, même quand je fais des pâtes, je me demande toujours comment je peux mieux faire. D’ailleurs, je sais que pour cette raison, travailler avec moi est un enfer ! 

La difficulté physique

Je pense que la complexité du Vendée Globe réside dans le fait que quand tu te reposes, ce n’est pas comme à la maison. Je suis un sportif, je me fais des séances avec des triathlètes qui se donnent à fond. Après je rentre à la maison, je mange et je me douche... Et le lendemain, je suis de nouveau prêt à faire une nouvelle séance. Là, c’est différent. Tu pars avec les batteries à 100%. Mais dès la première semaine, tu te fatigues. Quand tu recharges tes batteries, à chaque fois, ton seuil descend. Tu recharges à 90%, puis à 80%, puis à 40%… Le corps ne parvient plus à rétablir son état initial. 

Parfois, quand tu manges, ça tape de partout, tu renverses tout. Tu fais de l’escalade tout le temps. Faut s’accrocher partout comme une araignée. Il faut gérer les risques. Rien que se faire à manger, c'est la gestion d' un risque avec la bouilloire ! 

La communication

J’ai passé des moments durs, j’ai pété des câbles ! Je pensais par contre que ça ne servait à rien de communiquer là-dessus. J’imaginais beaucoup les gens à terre, à la maison avec le couvre feu. Alors je voulais partager du positif. Je crois que si on commence à trop se plaindre de notre sort, on ne va pas s’en sortir. J’avais vraiment ça à coeur. J’ai choisi d’aller faire le Vendée Globe. J’ai choisi l’inconfort, la difficulté. En italie on dit : Tu as voulu le vélo, et bien tu pédales ! 

Ça ne m'intéresse pas le classement italien. Je veux juste un vrai classement ! Je suis née à Florence, j’ai des copains partout dans le monde, je parle 4 langues, j’ai vécu en Espagne. J'habite en France, mes enfants y sont nés.

Programme à suivre

Le premier programme, c’est de jouer beaucoup avec mes enfants ! Après, j’ai envie de partir en montagne pour changer un peu et parce que j’ai besoin de faire un break. Je ne suis pas occupé seulement par le Vendée Globe mais aussi par le projet. Évidemment, j'aimerais retourner à Florence, normalement nous y allons pour Noël, mais aujourd'hui ma vie est à Lorient. "