New York Vendée - Les Sables d'Olonne New York Vendée - Les Sables d'Olonne
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05 Juillet 2023 - 18h19 • 3168 vues

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Trois skippers internationaux du Vendée Globe ayant participé avec succès à l'édition 2020 ont réalisé des chantiers d’hiver d’optimisation conséquents et assez similaires sur leur IMOCA. L'Italien Giancarlo Pedote (Prysmian Group), la Britannique Pip Hare (Medallia) et le Japonais Kojiro Shiraishi (DMG MORI Global One) se préparent désormais activement à la Rolex Fastnet, qu'ils disputeront en double d’ici la fin du mois. 

Les trois skippers partagent le même constat : bien qu'ils soient tous excités par le potentiel de performance de leur "nouvelle" machine, ils jugent nécessaire d’avancer progressivement pour les fiabiliser et apprendre à "trouver les manettes."  

Après avoir installé de nouveaux foils (rouges et verts pour compléter la coque blanche et refléter le drapeau tricolore italien) pendant l'hiver, Pedote, septième du dernier Vendée Globe, a remis à l'eau son plan VPLP/Verdier de 2015 mi-mai. Il explique que ses foils sont similaires à ceux de V and B - Monbana - Mayenne et Guyot Environnement - Water Family et qu’il a échelonné ses améliorations sur deux ans. L'année dernière, le skipper italien avait modifié son étrave pour la rendre plus arrondie et avait renforcé la structure de son IMOCA.   

Aujourd'hui, il se réjouit des gains de vitesse attendus avec ses nouveaux foils : « L'amélioration de la vitesse devrait être d'environ 15 % sur l'ensemble du parcours. Je volerai plus tôt, dans des conditions plus légères, même si le bateau est maintenant un peu plus lourd. » 

Son objectif actuel, comme celui de Pip et Kojiro, consiste à monter en puissance progressivement. Cette saison est moins axée sur la recherche de performance que sur la fiabilisation sur bateau : « Ces premières navigations seront consacrées à la fiabilisation des systèmes. Une fois cet objectif atteint, nous nous concentrerons sur la performance. Il ne faut jamais oublier que pour performer sur une course, il faut d’abord la terminer ! » 

Giancarlo est heureux de travailler avec une petite équipe, de "mettre les mains dans la colle" : « J'aime tout l'aspect technique et c’est indispensable pour progresser. Il faut être présent à 100 % pour tous les choix techniques, car lorsque vous êtes seul à naviguer, vous avez besoin de connaître parfaitement le bateau. Ça permet de le pousser à fond et d’être en mesure d’effectuer des réparations lorsqu’une casse se produit. » 

Après six mois passés au chantier Carrington Boats pour refaire l'étrave de Medallia, plus arrondie et spatulée - sans être aussi radicale que celle de l’IMOCA Prysmian Group - et pour installer de nouveaux grands foils conçus par l’architecte Guillaume Verdier, Pip Hare avoue avoir eu beaucoup d’émotions lorsque son “nouveau” Medallia est sorti du hangar. 

« J'ai versé une larme ! Je me sens incroyablement privilégiée, je suis très fière de notre équipe et de ce que nous avons accompli. Nous avons intégré un Français adorable dans l’équipe, il s'est immergé dans le mode de vie anglais, en découvrant par exemple que chez nous, le déjeuner ne dure pas une heure mais un peu moins (rires). C’est super de l’avoir à nos côtés pour échanger avec les architectes et nos fournisseurs. » 

La semaine dernière, elle a quitté Hythe, près de Southampton, pour convoyer Medallia avec quelques membres de l’équipe jusqu’à sa base, à Poole. 

« La navigation était vraiment incroyable. Je savais que le bateau allait être différent, mais je n’avais pas imaginé que ce serait à ce point. Nous avions des conditions parfaites, un plan d'eau très plat et un vent de 15 à 18 nœuds. Le bateau s'est lancé dans la brise, l’étrave s'est soulevée et nous avons tous retenu notre respiration... Nous avons décollé et atteint 29 nœuds ! Les bruits sont différents, le bateau est super léger. Le potentiel que je vois est absolument énorme, c'est tellement excitant, tellement grisant, je suis tellement contente ! Mais nous avons une montagne de choses à apprendre maintenant. Et pour le moment, l’objectif est de fiabiliser le bateau pour la prochaine course, la Rolex Fastnet. » 

Elle explique : « Pour l’instant, nous n'avons pas de nouvelles polaires (prévisions de vitesse générées par ordinateur). Lorsque nous discutions avec Guillaume Verdier, qui a toujours confiance en les chiffres, il disait que nous pourrions être à 95% d'un bateau neuf. Nous aurions aimé aller aussi loin que Giancarlo sur la modification de l’étrave - elle est modifiée sur près de six mètres - mais nous avions un budget restreint. Notre modification d'étrave est petite et parfaitement formée ! Et au bout du compte, tout est une question de régularité, il faut être capable d'atteindre des vitesses moyennes élevées. » 

Ambitieuse mais pragmatique, elle sait qui sont les concurrents à qui se mesurer : « Nous devons nous comparer à Damien (Seguin), Giancarlo (Pedote), Romain (Attanasio), Benjamin (Dutreux) car nous avons tous des bateaux de même génération désormais équipés de grands foils. J'aimerais me battre avec eux. Je pense que Damien et Benjamin devraient être les plus performants de cette génération, mais mon objectif est d'essayer de talonner les bateaux de la génération 2020. Pour ce qui est du Vendée Globe, nous savons tous que c’est très différent des autres courses. Sur deux mois, il s'agit de maintenir des moyennes, de gérer les problèmes. La prochaine édition va être très, très excitante parce qu'il y a une telle diversité de bateaux et de skippers que personne ne peut prédire ce qui va se passer. » 

Mentalement et concrètement, le retour à la compétition a été long pour le Japonais Kojiro Shiraishi qui avait été contraint à l’abandon quelques heures après le départ de la Route du Rhum - Destination Guadeloupe à l'automne dernier, suite à une collision avec l’IMOCA d’Oliver Heer.   

Kojiro se souvient : « J'ai dû rapidement rebondir et retrouver un esprit plus positif. Il était de mon devoir d'aider Oli à revenir dans la course et je suis heureux qu'il ait pu terminer la Route du Rhum à temps. Très vite, avec l'équipe, nous avons dû nous concentrer sur la suite. L'objectif que je me suis fixé pour le prochain Vendée Globe est d'entrer dans le top 10 : nous devions donc améliorer certaines choses sur le bateau. Une fois le chantier lancé à Lorient, je suis retourné au Japon auprès de ma famille et je me suis excusé auprès de mes sponsors pour avoir fait une si mauvaise course. Tous les membres de notre équipe basés en France sont également allés au Japon pour rendre visite à nos sponsors. C’est très important de maintenir ce lien et d'apprendre la culture japonaise. » 

© Clément Gerbaud / Qaptur / DMG MORI

Kojiro et son équipe ont navigué ce week-end pour la première fois. Le skipper est conscient de la pression qu'ils subissent aujourd'hui, n'ayant pas validé leur première course de qualification pour le Vendée Globe :   

« Pour se qualifier, nous devons participer et terminer toutes les courses à venir, nous n'avons donc pas le droit à l'erreur. Nous avançons pas à pas, nous étudions le bateau comme s'il était neuf. Notre objectif est qu'il soit prêt à prendre le départ du Vendée Globe l’année prochaine. » 

Les principales modifications apportées à DMG MORI Global One sont, comme Pip et Giancarlo, les foils et l'étrave, toutes deux supervisées par VPLP. « Nous avons travaillé avec les architectes pour développer des foils qui améliorent les performances dans des conditions de vent arrière VMG et maintiennent nos capacités dans des conditions de reaching. La première étape de la conception fut de trouver la bonne forme. Nous avons ensuite travaillé sur des simulateurs pour voir comment le bateau pourrait réagir dans différentes conditions. Nous cherchions surtout à augmenter la stabilité et la vitesse moyenne, pas la vitesse pure. » Kojiro se fait l'écho de ses rivaux. 

La coque a été coupée sur environ 5 mètres pour greffer une nouvelle carène plus plate avec un plus grand rocker. Le skipper japonais explique : « Le bateau volera sur ses foils dans un vent plus léger qu'auparavant. Les foils seront capables de réguler la portance, ce qui nous permettra de mieux contrôler le bateau. » 

L'équipe DMG MORI a évolué et s'est agrandie : « Nous avons intégré Thierry Duprey du Vorsent, un marin talentueux, qui était auparavant skipper du trimaran Gitana et membre de l'équipage du Jules Verne avec Banque Populaire. Il a rejoint l'équipe l'année dernière pour devenir notre boat captain. Thierry sera mon co-skipper cette année sur la Rolex Fastnet et la Transat Jacques Vabre. Nous avons aussi intégré Benoit Mariette, un coureur de Figaro à succès, l'année dernière en tant que directeur technique. Il naviguera avec moi sur le Défi Azimut. » 

Kojiro conclut, « Les principaux objectifs pour nous sont de mieux comprendre le bateau afin de terminer toutes les courses qui nous attendent et de recueillir autant de données que possible sur le bateau afin de mieux le comprendre. Nous nous entraînerons autant que possible afin d'acquérir des automatismes et être prêts pour les courses à venir. »